Frappé pour la première fois en 1311, à la fin du règne de Philippe IV le Bel (roi de France de 1285 à 1314), l’agnel d’or représente sur l’une de ses faces l’Agneau, symbole du Christ, et au revers, une croix fleurdelisée. Monnaie d’or pur (24 carats), il pesait un peu plus de 4 grammes. Cette pièce a été frappée jusqu’en 1326.

Cette monnaie, outre ses qualités artistiques, est intéressante à plusieurs titres.

L’image choisie (iconographie) renoue avec la présence de symboles religieux sur l’avers des pièces de monnaie (leur présence sur le revers, avec la croix, est beaucoup plus constante dans le monnayage français, des carolingiens au début du 18e siècle). Les pièces à motifs exclusivement chrétiens étaient assez fréquentes à Byzance et l’Agneau était présent sur une pièce anglaise dès le début du XIe siècle. Cependant, pour la France, l’agnel d’or correspond à une innovation. Il s’agissait de rappeler le lien entre le roi et la chrétienté mais cette évolution est aussi sans doute à rapprocher de la généralisation de l’utilisation de l’or dans le monnayage français à partir de Philippe le Bel : une pièce ayant un symbolisme sacré était logiquement associée à l’or, qui a été, de longue date, considéré comme le matériau noble par excellence.

Philippe le Bel, « roi faux-monnayeur »

Il s’agit de la dernière émission de pièce d’or par Philippe le Bel. Ce monarque a fait frapper une grande variété de monnaies : cinq autres types de monnaies d’or, trois monnaies d’argent et une douzaine de monnaies de billon (alliage de faible valeur intrinsèque, de cuivre et d’argent, avec une proportion d’argent variable selon les monnaies). Cette multiplication des émissions et les fortes variations de valeur des pièces émises par rapport à l’or ont conduit certains commentateurs de l’époque à qualifier Philippe le Bel de « roi faux-monnayeur ».

Si ce n’est évidemment pas le cas (le roi ayant agi en toute légalité et accompagné toutes les mutations monétaires de son règne des ordonnances correspondantes), ces accusations révèlent bien le malaise créé par les changements monétaires nombreux sous son règne. Par exemple, en remplaçant le mantelet d’or par l’agnel, le roi produisait avec la même quantité d’or 18 % de plus de valeur (en denier tournois, dans lequel les prix étaient libellés). Ces mutations monétaires s’expliquaient, en partie, par l’objectif de faire rentrer de l’argent dans les caisses de l’État : une taxe (ou droit de seigneuriage) étant prélevée par l’État sur toutes les pièces fabriquées dans ses ateliers, la multiplication des types monétaires et donc des frappes conduisait à un accroissement des revenus fiscaux. Les dépréciations du denier tournois, utilisé pour le libellé des rentes, se traduisaient, en outre, par une baisse de la valeur nominale de la dette publique, rendant son remboursement, dans l’immédiat, plus aisé. Mais la forte inflation qui résultait de ces manipulations monétaires avait des conséquences négatives sur le niveau de vie et suscitait le mécontentement de la population. Elles conduisaient également les détenteurs de monnaies à conserver les bonnes monnaies anciennes voire à utiliser des monnaies étrangères et allaient donc à l’encontre d’un autre objectif de la politique monétaire de Philippe le Bel : augmenter les moyens de paiement (notamment ceux émis par la couronne de France) dans un contexte général de développement du commerce.

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Agnel d’or.
Crédit : Banque de France

 


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Publié le 08 Février 2012. Mis à jour le 08 Mars 2022