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LES BILLETS DE NÉCESSITÉ FRANÇAIS PENDANT LA GUERRE DE 14-18

Les périodes troublées de l’histoire – conflits internationaux, guerres civiles, etc. – se traduisent souvent par une désorganisation de l’économie et des circuits de paiement. En France, pendant la Révolution ou lors des guerres de 1870, 1914-1918 et 1939-1945, des émissions dites « de nécessité » ont ainsi été réalisées par des organismes non étatiques, pour remédier à l’insuffisance de petite monnaie. C’est lors de la guerre de 1914-1918 que ces émissions ont eu la plus grande ampleur en France. La Cité de l’économie et de la monnaie exposera plusieurs exemples de billets de nécessité.

En 1914, du point de vue monétaire, la réaction des autorités à la situation de guerre a été très rapide : dès le 5 août 1914 (soit 2 jours après la déclaration de guerre de l’Allemagne à la France), un décret instaurait le cours forcé du franc, supprimant ainsi l’obligation faite à la Banque de France de rembourser en pièces d’or ou d’argent les billets qui lui étaient présentés. Parallèlement, la Banque de France mit en circulation des billets de banque de faible dénomination (20 et 5 francs), qu’elle avait en réserve afin de prévenir un éventuel manque de monnaie métallique. Ces mesures se révélèrent cependant vite insuffisantes comme en témoignent les émissions de billets de nécessité réalisées dans différentes villes (Lille, Bordeaux, par exemple), dès fin août ou en septembre 1914, pour remplacer la monnaie métallique.

Plusieurs raisons expliquent cette rapide pénurie de monnaie métallique, qui perdurera pendant toute la guerre et au-delà, jusqu’en 1923 :

- la thésaurisation : le climat d’incertitude créé par la guerre a amené les français à conserver leurs pièces d’or ou d’argent et ce, d’autant plus que l’instauration du cours forcé du franc ne leur permettait plus de s’en procurer auprès de la Banque de France. L’or des français fera d’ailleurs l’objet, à partir de 1915, d’une collecte destinée à financer l’effort de guerre, qui remportera un grand succès (cf. aussi ci-dessous) ;

- la substitution de règlements au comptant aux paiements à crédit qui étaient couramment pratiqués en temps de paix : cette substitution accroissait le besoin en espèces et en petite monnaie ;

- la situation particulière des territoires occupés, dès l’été 1914, par l’armée allemande, dans le Nord et l’Est de la France, et qui ne pouvaient donc plus être approvisionnés en moyens de paiements par la Banque de France.

Les billets de nécessité ont été majoritairement émis par les Chambres de commerce, avec l’autorisation du gouvernement et par dérogation au privilège d’émission de la Banque de France. Le recours aux Chambres de commerce présentait un double avantage. Celui de la sécurité financière, du fait de leurs ressources propres mais également des dépôts de billets qu’elles étaient tenues de verser à la Banque de France en contrepartie de leurs émissions. Et celui de leur bonne connaissance de l’économie locale et donc des besoins effectifs en petite monnaie. Pendant la guerre de 1914-1918, plus d’une centaine de chambres de commerce ont ainsi émis des billets de nécessité. À ceux-ci, se sont ajoutées les émissions de nombreuses municipalités et de quelques sociétés industrielles. Ces billets, d’une valeur faciale de 50 centimes, 1 F, 2 F, parfois plus, étaient toutefois d’un usage relativement restreint, à l’intérieur du champ d’action de la chambre de commerce, de la municipalité, voire de la région considérée.

Dans les territoires occupés par l’armée allemande, la disparition pratiquement totale de la monnaie métallique, réquisitionnée par l’occupant, a conduit à des émissions considérables de billets de nécessité, réalisées sans l’aval du gouvernement français et, bien souvent, sans aucun dépôt de garantie correspondant.

1918, une situation monétaire complexe

Au sortir de la guerre, en 1918, la situation monétaire était donc assez complexe, compte tenu du grand nombre de billets de nécessité de types différents alors en circulation et de la pénurie persistante de petite monnaie. La Chambre de commerce de Paris fut autorisée à réaliser une grosse émission en 1920, destinée notamment à remplacer les billets de nécessité en circulation dans les différentes provinces et à les uniformiser. L’échange de ces nouveaux billets de nécessité avec les pièces de monnaie correspondantes se fit ensuite progressivement et ce n’est qu’en 1926 que les billets de nécessité furent définitivement retirés de la circulation (loi du 13 janvier 1926). Les derniers détenteurs disposaient d’un délai de trois mois au-delà duquel il ne leur était plus possible de se faire rembourser.

Pour des raisons liées à la situation d’économie de guerre, les billets de nécessité français de cette période se caractérisent souvent par l’absence d’illustration : ils ne comprennent alors que du texte, imprimé sur papier blanc ou de couleur unie. Mais plusieurs comportent des motifs d’encadrement (géométriques ou floraux par exemple – cf. photo –) voire des dessins (figures mythologiques, blasons de collectivités locales, etc).

Le phénomène des billets de nécessité a concerné de nombreux pays belligérants pendant la guerre de 1914 : l’Allemagne ou la Belgique, par exemple.

Voir aussi l’article et la vidéo sur l’or des français pendant la Première Guerre mondiale.

Pour en savoir plus sur les émissions en Belgique, voir en ligne la col­lection de billets de nécessité belges de l’époque 1914-​​1918 du Musée de la Banque nationale de Belgique.

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Photos :
Photo illustrant l’article : billet de nécessité de 1 Franc de la commune de Banteux (59) émis par délibération du Conseil municipal du 22 août 1915, imprimé en noir sur blanc.

Crédit images : collection Banque de France


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Publié le 08 Octobre 2014. Mis à jour le 27 Janvier 2022