L’éditorial de François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France

Nous traversons une crise sanitaire sans précédent. Il s’agit avant tout d’un drame humain, qui doit mobiliser collectivement toutes les énergies pour mener une bataille sanitaire prioritaire. En parallèle, nous devons aussi mener la bataille économique, pour donner à toutes les entreprises françaises, – y compris les TPE et les PME – et à leurs salariés, tous les boucliers nécessaires pour tenir et redémarrer ensuite dans les meilleures conditions possibles. C’est le sens de l’action rapide, forte et convergente qu’ont menée gouvernements et banques centrales, au cours des dernières semaines. La Banque de France est bien évidemment engagée au cœur de cette bataille.

Dans ce contexte, et en cohérence avec notre mission d’éducation financière des publics, il nous a semblé important de mettre rapidement à la disposition du grand public ce site internet qui a pour vocation d’expliquer et de faire toute la lumière sur cette crise et les réponses économiques qui y sont apportées. Vous y trouverez aussi des réponses aux questions concrètes que chacun de vous peut se poser au quotidien dans cette période difficile. Le contenu de ce site internet sera enrichi et mis à jour au fur et à mesure de l’évolution des événements, y compris après la fin du confinement. Je crois qu’ensemble nous pouvons gagner cette bataille économique. Comptez sur la mobilisation sans relâche de la Banque de France, et des 10 000 femmes et hommes qui y travaillent au service de l’économie et de la société.

 

De la crise sanitaire à la crise économique : comprendre en infographie

 

Infographie - de la crise sanitaire à la crise économique

 

Quelles perspectives économiques face à la crise sanitaire ?

La crise sanitaire du Covid-19 et les mesures prises pour l’endiguer provoquent un coup d’arrêt inédit à l’activité économique qui subit un double choc d’offre et de demande. Les conséquences économiques sont très incertaines. Mais on peut imaginer quatre scénarios possibles (voir graphique) en fonction de deux paramètres clé : (i) la durée du confinement et (ii) la nature de la reprise :

  • La reprise pourrait se faire avec un rattrapage en « V » qui atténuerait l’ampleur de la récession par un retour à un niveau d’activité proche de celui qui prévalait avant crise. Ce serait un scenario favorable.
  • Il est aussi possible que la reprise se fasse sans rattrapage du niveau d’activité qui prévalait avant la crise, selon un scénario en « L », comme lors de la crise de 2008-2009 qui avait durablement affecté le niveau du PIB. La nature du rebond dépendra des mesures prises pour prévenir la résurgence de l’épidémie, de l’efficacité des actions mises en œuvre au plus fort de la crise pour limiter les dommages économiques sur les agents, et des politiques économiques, nationales mais aussi internationales, qui accompagneront la sortie de crise.

 

Représentation des différents scénarios envisagés.

 

Comment la Banque de France agit-elle ?

La crise sanitaire du Covid-19 est d’abord un problème de santé publique. La bataille sanitaire que notre pays a engagée depuis plusieurs semaines est clairement prioritaire. Cependant, les actions ­­mises en œuvre pour endiguer la propagation du virus secouent fortement l’économie française. Il est absolument vital d’aider nos entreprises à traverser la crise dans les meilleures conditions possibles. Aux côtés des pouvoirs publics, la Banque de France est pleinement mobilisée dans cette bataille économique.

La Banque de France agit d’abord au sein de l’Eurosystème, qui regroupe la Banque centrale européenne (BCE) et des banques centrales nationales des 19 pays de la zone euro.

La Banque de France est activement mobilisée au sein de l’Eurosystème, dont le mandat est de maintenir la stabilité des prix en zone euro. L’Eurosystème fonctionne de manière collégiale et décentralisée : la Banque de France participe à la prise des décisions et les met en œuvre.

En réaction à la crise sanitaire, l’Eurosystème a pris des décisions fortes et rapides pour soutenir le financement de l’économie.

  • Tout d’abord pour les acteurs économiques (ménages, entreprises) qui se financent auprès des banques, des fournitures de liquidités aux banques de la zone euro qui pourront aller jusqu’à 3000 milliards d’euros en 2020. Pourquoi aider les banques ? En soutenant la liquidité des banques, on soutient leurs clients, c’est-à-dire tous ceux ont besoin d’obtenir des crédits auprès des banques : les ménages, et les entreprises, notamment les PME et les TPE, qui peuvent avoir des besoins urgents de trésorerie à combler. On évite ainsi des faillites et des licenciements.
  • Ensuite, pour les acteurs qui se financent via les marchés financiers (États ou grandes entreprises) ; des achats de titres de dette à hauteur de 1000 milliards d’euros en 2020. Comment est-ce que cela fonctionne ? En achetant les titres de dette, l’Eurosystème prévient le risque d’une hausse des taux d’intérêt de long terme liée à la charge exceptionnelle de la crise sanitaire. Les États peuvent par exemple mettre en œuvre plus de moyens budgétaires pour lutter contre l’épidémie.

Les équipes de la Banque de France déploient au niveau national ces programmes décidés collégialement par l’Eurosystème.

Dans le cadre de ses missions de services à l’économie, la Banque de France soutient le bon financement des entreprises et les ménages fragiles.

Elle agit d’abord dans le cadre de la Médiation du crédit : ce dispositif public vient en aide depuis 2008 à toute entreprise qui rencontre des difficultés avec un ou plusieurs établissements financiers (banques, crédit bailleurs, sociétés d’affacturage, assureurs-crédit, etc.). La Médiation du crédit est présente sur l’ensemble du territoire, grâce à l’action de 105 médiateurs du crédit qui sont les directeurs de la Banque de France en métropole et les directeurs des instituts d’émission en Outre-mer. C’est un dispositif gratuit et efficace. Le médiateur du crédit peut être saisi par mail. Il vous recontacte dans les 48 heures suivant la saisine. 

Elle surveille également les délais de paiement inter-entreprises. Le comité de crise mis en place par la Banque de France et le ministère de l’Économie, veille au respect de cette règle indispensable à la survie de certaines entreprises.

La Banque de France, en tant que garante de la stabilité du système financier, veille à la solidité du secteur bancaire, qui est essentielle au financement de nombreuses entreprises en France, surtout les plus petites. Dans ce cadre, certaines exigences règlementaires pesant sur les banques ont été relâchées, afin que celles-ci optimisent leurs capacités à financer les entreprises. Nous pouvons le faire car la solidité financière des banques a été considérablement renforcée au cours des 10 dernières années. Nous avons retenu les leçons de la crise de 2008 et aujourd’hui la crise n’est pas de nature bancaire dans son origine.

La Banque de France continue d’apporter son aide aux ménages les plus fragiles. Bien qu’elle n’accueille plus de public à ses guichets, ses dispositifs ont été adaptés pour assurer ses missions au service des particuliers dans les meilleures conditions.

Nous mettons tout en œuvre, avec l’ensemble des partenaires concernés, pour apporter aux situations de surendettement une solution dans les meilleurs délais, tant pour les dossiers en cours que pour les demandes à venir. Toutes les questions peuvent être posées par internet et il y sera répondu dès que possible.

En tant que gardienne de la monnaie, elle assure le bon fonctionnement des paiements en période de crise.

Toutes les dispositions ont été prises pour qu’il ne résulte aucune conséquence de cette situation inédite pour les Français dans l’accès aux espèces. Un groupe de robustesse piloté par la Banque de France et associant tous les acteurs de la filière est en place pour veiller à l’alimentation des points de distribution d’espèces sur tout le territoire.

La cellule en charge d’assurer la continuité de l’activité fiduciaire en cas de crise n’a observé aucune hausse particulière des retraits auprès des 53 000 distributeurs automatiques de billets implantés en France métropolitaine, mais reste néanmoins vigilante et suit très attentivement l’évolution des retraits d’espèces.

D’après les études disponibles, les billets de banque ne comportent pas de risque de propagation du virus. Il faut bien sûr continuer à appliquer les gestes barrière et se laver les mains fréquemment.

 

Vous trouverez ici d’autres informations concernant l’impact économique du Covid-19.

 


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Publié le 14 Avril 2020. Mis à jour le 09 Mars 2022